Les yeux rougis

 Les yeux rougis




A lire en écoutant "concernant"
https://clairobscur.bandcamp.com/album/nulle-aide

Mes yeux sont rougis de chlore plutôt que de mes larmes libérées. Je les garde au-dedans de moi. Je nage. Ma peau est toute froissée, mes mains méconnaissables. Mon effort noie mes souvenirs. J'oublie le temps d'une longueur. Je veille mon souffle. Les cris du Monde sont congédiés au-dehors. Les gestes d'amitié aussi. On perd nos corps sur la distance que nous ménageons avec le virus. Nous brassons l'eau chlorée chargée des cohortes de nos miasmes mortes. 

C'est un refuge. Le vacarme sous la coupole noie efficacement la sensation d'isolement qui nous envahit sitôt évoqué le spectre de la contagion. Au-delà de la lumière d'été qui perce les nuages noirs d'orage, les projecteurs achèvent de dissiper autour de nous et en nous l'obscur. 

Nos têtes sont en pleine lumière. 

Nos corps se gorgent de vie aux cris, aux éclaboussures qui jaillissent et résonnent sous la coupole du centre nautique. 

Ici je perds le temps. J'égare l'instant et lui donne la ligne pour perspective. 

J'y pense et puis j'oublie. 

C'est une nouvelle vie. 

Mes forces et une part de mon souffle demeurent dans l'onde au fond du bassin. 

Le sol rapeux me retient encore un peu. 

J'envisage une nouvelle escapade dans le fluide, mais y renonce lorsque ma cheville se dérobe. 

Je me suis vidé dans l'eau, dans cette promiscuité licite. Je suis sec au-dedans. 

J'ai tari mes larmes. Même ma douche n'y peu rien. 

Devant le miroir je contemple min reflet. 

Je ne reconnais pas. Les ombres dansent au rythme des sautes des néons. 

Ma peau a une drôle de couleur comme si elle s'apprêtait à fuir le reste de mon corps. 


Pétales dérobés,

Mèches blanches au front apparues,

Le vent a souffé son temps. 



Commentaires

  1. Petit conseil : place les conseils musicaux au début du texte plutôt qu'à la fin :)

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